Depuis quelques jours, une rumeur affolante envahit les réseaux sociaux : la pilule contraceptive serait aussi cancérigène que le tabac ou l’alcool. En réalité, si le risque est avéré, il reste très modéré.
« La pilule est classée cancérigène de type 1 par l’OMS, comme le tabac ou l’amiante » : cette affirmation, largement relayée sur X et TikTok ces derniers jours, a semé la panique chez de nombreuses femmes. Pourtant, cette information n’a rien de nouveau. La classification en « cancérogène de groupe 1 » des contraceptifs oraux combinés date de 2005 et a été étendue à d’autres formes de contraception hormonale en 2023 par le CIRC, le Centre international de recherche sur le cancer, un organe de l’OMS.
Mais attention : cette catégorie ne classe pas les substances en fonction de leur niveau de dangerosité, mais selon le niveau de certitude scientifique qu’elles peuvent causer le cancer. Concrètement, cela signifie qu’il existe des preuves solides que la pilule peut provoquer certains cancers — notamment du sein — mais pas qu’elle est aussi dangereuse que le tabac ou l’alcool. Le docteur Olivier Marpeau, gynécologue, précise ainsi dans les colonnes de 20 minutes : « Bien que l’OMS les ait classés dans la même catégorie, cela ne veut pas dire que le risque est le même. Le risque lié à la pilule est avéré mais très modéré. » Il insiste : la classification du CIRC « ne reflète pas le niveau de danger, mais le niveau de preuve ».
Un risque avéré mais modéré, à mettre en perspective
Oui, la pilule peut légèrement augmenter le risque de cancer du sein, notamment en cas de prise précoce (avant 20 ans) et prolongée (plus de 10 ans). Mais ce risque diminue après l’arrêt du traitement, pour redevenir équivalent à celui des femmes n’ayant jamais pris la pilule. De plus, le cancer du sein dépend de nombreux autres facteurs : antécédents familiaux, mode de vie, consommation d’alcool, surpoids, âge de la première grossesse…
Le docteur Véronique Leray, de la Fondation contre le cancer, rappelle : « Le contraceptif est un facteur parmi d’autres, le risque est prouvé mais modéré. » En France, 1 femme sur 8 développera un cancer du sein au cours de sa vie, mais détecté tôt, ce cancer guérit dans 9 cas sur 10. En parallèle, la pilule a aussi des effets protecteurs. Elle permettrait d’éviter des milliers de cancers de l’endomètre et de l’ovaire chaque année. Une étude du CIRC à Lyon estime que plus de 400.000 cas de cancer de l’endomètre ont été évités grâce à l’usage prolongé de la pilule dans le monde. Une autre recherche menée à Oxford montre que dix ans de prise continue réduisent de 50 % le risque de cancer de l’ovaire.
Une contraception à adapter au cas par cas
La contraception hormonale n’est pas exempte de risques : phlébite, embolie pulmonaire, migraines, troubles de l’humeur… C’est pourquoi chaque prescription doit être adaptée à l’âge, au mode de vie, aux antécédents médicaux et au profil hormonal de la patiente. « Il est important d’évaluer la balance bénéfice-risque », rappelle le docteur Marpeau. Certaines pilules sont déconseillées chez les fumeuses. À l’inverse, elles sont parfois le seul traitement efficace chez des femmes atteintes d’endométriose. Le stérilet en cuivre, souvent présenté comme une alternative plus « naturelle », peut quant à lui aggraver les symptômes chez ces patientes. En pleine vague d’hormono-bashing sur les réseaux sociaux, le gynécologue alerte : « La contraception parfaite et sans risque, ça n’existe pas. » Il rappelle que le risque d’une IVG est bien plus élevé, à la fois pour la santé physique que pour la santé mentale.
👉 À retenir : Non, la pilule n’est pas aussi dangereuse que le tabac. Oui, elle est classée parmi les cancérogènes avérés, mais cela ne signifie pas qu’elle doit être évitée. Comme toute décision médicale, le choix d’une contraception doit être guidé par un dialogue personnalisé entre une patiente et son professionnel de santé.