Les avancées de la science repoussent les limites de l’impossible. Des chercheurs suisses de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) ont développé un dispositif innovant à base d’électrodes cérébrales permettant à des personnes atteintes de lésions incomplètes de la moelle épinière de retrouver une capacité de marche partielle. Une technologie qui suscite un immense espoir parmi les blessés de la moelle épinière.
Une technologie révolutionnaire pour les blessés de la moelle épinière
En 2022, une première patiente atteinte de lésions incomplètes de la moelle épinière s’est exclamée : « Je sens mes jambes », lorsque le dispositif expérimental a été activé. Ce système repose sur des électrodes implantées dans une région clé du cerveau, l’hypothalamus latéral, connue pour son rôle dans la motivation et l’éveil. Ces électrodes, reliées à un stimulateur implanté dans la poitrine, envoient des impulsions électriques qui réactivent certaines fibres nerveuses encore présentes mais inactives dans la moelle épinière.
« Dès que nous augmentons le courant, les patients ressentent l’envie de marcher », explique la neurochirurgienne Jocelyne Bloch. Cette stimulation cérébrale, combinée à une rééducation intensive, a permis à des patients paralysés de retrouver une autonomie partielle. Wolfgang Jäger, un patient de 54 ans paraplégique depuis un accident de ski en 2006, témoigne : « Je peux maintenant monter quelques marches d’escalier seul, sans compter sur les autres tout le temps. »
Cartographier le cerveau pour réactiver les fibres nerveuses
Les chercheurs ont utilisé l’imagerie 3D pour cartographier les zones cérébrales impliquées dans la motricité chez des souris présentant des lésions similaires. Ils ont ainsi établi un véritable atlas cérébral et identifié l’hypothalamus latéral comme la région clé pour restaurer la communication entre le cerveau et la moelle épinière. La stimulation ciblée de cette zone permet de réveiller les fibres nerveuses résiduelles, offrant une nouvelle chance aux patients atteints de paraplégie. L’intervention, réalisée sous anesthésie locale, permet au patient de rester conscient pour ressentir les effets immédiats de la stimulation. Cela garantit une précision chirurgicale et évite toute interférence avec d’autres fonctions cérébrales, comme le langage.
Des résultats prometteurs, mais encore des défis à relever
Malgré ces avancées, cette technologie reste expérimentale et limitée aux patients souffrant de lésions incomplètes, où la connexion entre le cerveau et la moelle n’est pas totalement rompue. Grégoire Courtine, professeur en neurosciences à l’EPFL, précise que la technique ne peut pas encore s’appliquer à tous les blessés médullaires. « Certaines personnes ne sont pas à l’aise avec une intervention cérébrale, et nous devons encore affiner cette méthode pour garantir des résultats constants », explique-t-il. Les patients participant à l’essai continuent de bénéficier d’un suivi rigoureux et d’une rééducation prolongée pour maximiser leur récupération. Si cette technique atteint un niveau de fiabilité suffisant, elle pourrait un jour s’appliquer à un plus grand nombre de personnes et transformer profondément leur qualité de vie.
Cette avancée scientifique ouvre de nouvelles perspectives pour des millions de personnes atteintes de lésions de la moelle épinière dans le monde. En combinant technologie, rééducation et recherche fondamentale, les chercheurs suisses apportent non seulement des solutions médicales mais aussi un message d’espoir. Comme le rappelle Wolfgang Jäger : « Maintenant, je peux envisager de nouvelles choses. C’est agréable de ne plus dépendre des autres. » La route reste longue avant une adoption généralisée de cette technique, mais chaque pas accompli par ces patients est une victoire pour la science et pour tous ceux qui rêvent de retrouver leur mobilité.